Une cuisine aux petits oignons

Léa vous livre ses secrets pour une cuisine adaptée à son handicap. "Personne ne connaît mieux mon handicap, mes routines et mes envies que moi-même."

Une cuisine aux petits oignons

Lorsqu'on est porteur(s) d'un handicap, les deux pièces essentielles de notre chez soi sont la salle de bain et la cuisine.

Mais pourquoi sont-elles si importantes ? Parce que, tout simplement, elles représentent le sésame de l'autonomie perdue dans notre intimité. Elles nous offrent l'opportunité d'être seul(e) et d'œuvrer quand et comme bon nous semble : une source de liberté.

Mais cette indépendance, il faut la créer, la penser avant de la commander. Voici quelques unes de mes clés pour ma cuisine parfaite. Personne ne connaît mieux mon handicap, mes routines et mes envies que moi-même. Alors oublions les dizaines de sites et de docs sur les équipements « pratiques » et « adaptés » et soyons pragmatiques !

Dans mon cas, j'ai divisé mon chemin vers la liberté en trois étapes que j'ai nommé : je veux- je peux – je solutionne.

Bonne nouvelle, le système D sera toujours le moins cher et le plus durable face à du mobilier de catalogue. Il sera aussi le plus adapté à mon handicap, mes routines et mes envies.

Étape 1 : je veux.

Cette première étape est probablement la plus longue à réaliser (presque 10 ans dans mon cas, mais on peut être plus rapide c'est sûr). Elle consiste à lister toutes les actions que je veux faire dans ma cuisine. Est-ce que je veux me préparer moi-même mon petit déjeuner, ou bien je préfère rester la marmotte qui a besoin de son café au lit pour en sortir ? Ok, je veux le préparer, maintenant comment faire pour ne pas y passer 3h ?

Lister les ingrédients et les rassembler à un même point (prévoir le pain à côté de la bouilloire par exemple, les sachets de thé avec les mugs …). Le but est d'optimiser ses déplacements pour rendre la tâche moins laborieuse. J'ai ensuite dupliqué ce questionnement sur l'ensemble des repas. Quels sont les plats que je veux cuisiner régulièrement ? J'ai rangé l'appareil à raclette sur une étagère inaccessible pour moi au quotidien mais j'ai le grille pain à porté de main.

Étape 2 : je peux.

Cette étape est en lien direct avec la troisième. Elle consistait à mettre en lumière mes "impossibles" pour réfléchir à une solution. Et oui, tout problème une solution. S'il n'y a pas de solution c'est qu'il n'y a pas de problème ! Par exemple, la bouilloire est trop lourde et elle est conductrice de chaleur, c'est trop risqué avec ma force de mouche ! Cette étape est fastidieuse car elle nécessite de séquencer chaque action et surtout de les tester ! Je couper du fromage mais je ne peux pas l'attraper s'il est au fond du réfrigérateur… C'est ballot !

Étape 3 : je solutionne.

Cette étape est la plus intéressante si vous aimez les casses-têtes ou que vous êtes inventifs.

Voici l'extrait d'une petite liste de solutions que j'ai trouvé pour ma cuisine :

  1. Bouilloire chaude et lourde : Robinet d'eau bouillante sur le plan de travail où je dépose ma tasse dessous ; ou super machine à café multi-fonctions ; ou bouilloire fournie que je remplis qu'à 1/3.
photographie d'une partie de la cuisine : meuble évier et plan de travail accessibles aux personnes en situation de handicap moteur
  1. Pas de placards sous le plan de travail ni en hauteur : Tiroirs (laissant un passage pour mon fauteuil) sur toute la longueur du plan de travail pour pouvoir accueillir les ustensiles principaux. Cellier annexe avec des étagères à la bonne hauteur et des silos pour se servir des produits en vrac (farine, sucre, pâtes…)
  2. Réfrigérateur et ses étagères tremblantes : Tiroirs réfrigérés
  3. Ranger les casseroles : Tirettes avec crochets en S sous le plan de travail
photographie îlots de cuisine accessible aux personnes en situation de handicap moteur

Il y a toujours une solution à trouver : ça sera peut-être finalement une aide humaine, mais pas forcément, à chacun de trouver SA solution.

Une fois que toutes les étapes sont réalisées, j’ai contacté Virginie, cuisiniste indépendante qui m’a conseillé sur les matériaux, les électroménagers et tout l’agencement en fonction du bilan de mes étapes réalisées. Je lui apporte les connaissances sur mon handicap, mes routines et mes envies ; elle m’apporte ses connaissances sur tout ce qui concerne la cuisine : on est tous pro dans un domaine ! Elle a dessiné entièrement ma cuisine après de longs entretiens.

Tout et fait, j’ai entre les mains, la cuisine m’offrant l’autonomie et la liberté.

photographie cuisine accessible aux personnes en situation de handicap moteur
photographie cuisine accessible aux personnes en situation de handicap moteur

Article et photographie par Léa BERNADET.